Un jour, dans une pharmacie de son quartier, le XXème arrondissement de Paris, Isabelle (Marion Held), brillante publicitaire âgée de 45 ans, élégante et distinguée, rencontre Mado (Dominique Marcas), une minuscule petite vieille toute rabougrie. Mado Bidois a 90 ans et chez elle tout est sale, sordide, désolant, atroce.
Malgré la panique de se sentir piégée, son dégoût, Isabelle va revenir chez Mado.
Tout les sépare.
Pourtant des rapports étroits vont se nouer entre les deux femmes, des rapports ambigus aussi, car la vieille dame combat désespérément pour sauver sa dignité et son autonomie. Et Isabelle change…
(Adapté du roman de Doris Lessing: “The Diary of a good neighbour”)
Dans le roman de Doris Lessing d’où le film est tiré: “The diary of a goodneighbour”, le personnage principal, journaliste au passé égoïste, n’a pas eu le courage de vraiment s’occuper des derniers moments de sa mère. De sorte que, quand elle rencontre la vieille femme, elle fait le chemin qu’elle n’a pas fait avec sa mère et elle porte sur cette étrangère un vrai regard, un regard d’amour, sans complaisance. J’ai perdu ma propre mère il y a dix ans, juste avant le tournage de mon film “Baptême”. J’ai été désemparé par sa maladie, par la perspective de sa mort. Je n’ai pas eu l’attitude qu’il fallait. C’est peut-être là que réside l’intérêt que je porte à ce roman et l’énergie que j’ai produite pour que le film existe correspond sans doute à cette nécessité intérieure.
Je savais que ce serait difficile. C’est toujours difficile avec Doris Lessing. C’est un écrivain âpre, sans concessions, qui ne va jamais dans le sens du poil et adapter ce livre pour le cinéma fût une gageure. J’ai écrit un premier scénario avec Arlette Langmann puis j’ai continué seul. Ensuite, Claude Sautet, qui adorait le sujet, a bien voulu m’aider. J’ai signé avec deux actrices connues mais, malgré cela, tous les partenaires financiers se sont esquivés, jugeant le sujet trop peu public. Le film ne devait pas se faire. Les assurances refusaient de garantir le risque d’une trop vieille actrice. Bref, il a fallu renoncer. Puis, avant l’été, fort de plusieurs expériences en petite caméra numérique effectuées à l’université Lille 3 où j’enseignais, je me disais que si je disposais d’un scénario de long-métrage qui se prêtait au numérique, c’est une expérience qui me tenterait. Et je me suis souvenu des 17 versions du scénario du Lessing que j’avais abandonné. C’était l’exemple parfait pour un film à tourner en DV: une proximité des personnages, des petits décors, le vingtième arrondissement…
Le lendemain matin, après une nuit blanche à réfléchir à tout ça, j’ai croisé ma voisine, Marion Held, une ancienne actrice, qui habite la jolie maison du film. Je m’étais déjà inspiré d’elle quand j’écrivais le scénario pour enrichir le personnage d’Isabelle. Je lui ai proposé de tourner le film chez elle et lui ai offert le rôle. Elle a sauté sur la proposition. Et m’a tout donné, son petit pavillon a fait le décor de la vieille, sa voiture, son énergie, son enthousiasme, sa joie à la perspective de tourner à nouveau… Mais il nous manquait encore Mado. Il fallait faire vite car pour des raisons pratiques, nous devions tourner trois semaines plus tard. Les quelques actrices auxquelles je pensais étaient trop vieilles, retirées, ou indisponibles. Le jeudi, j’ai dicté une annonce dans le journal “Libération”, demandant une femme âgée d’au moins 75 ans avec de la mémoire pour tourner dans un film. L’article est paru le vendredi. Le samedi matin, j’avais une lettre de Dominique Marcas. On m’avait parlé de cette actrice rare et talentueuse lors de mes recherches antérieures mais, à l’époque, il fallait un nom et, pour les assurances, l’âge de l’actrice ne devait pas dépasser 70 ans. Mais là, ça n’avait plus d’importance. Il n’y avait plus de budget, plus d’obligations, plus d’assurance-acteur. Dominique nous a conquis tout de suite et nous a rejoints immédiatement.
Avec les quelques centaines de milliers de francs que j’avais empochés grâce à la vente de mes deux premiers films à la chaîne de télévision Arte, j’ai récupéré les droits du livre et il me restait suffisamment d’argent pour prétendre assurer le tournage. Armé alors de mes deux actrices principales, d’une ultime version du scénario et de cette envie folle de faire le film, nous avons vaincu les derniers obstacles. Une équipe technique s’est vite organisée autour de François Lartigue pour la lumière, Christine Charpail pour le son et Fabienne Camara pour le montage. J’ai entraîné quelques étudiants de Lille 3 dans des stages de fin d’études pour les postes d’assistant, de script et de régisseuse.
Et nous avons tourné en DV cam avec la Sony PD 100. Avec une légèreté de machinerie incroyable (9 personnes sur le plateau au lieu de 28 ou 30). Pendant quatre semaines de 6 jours, nous avons investi notre quartier. Les commerçants ont participé, les voisins immédiats, les gens de la rue, à Ménilmontant, à Belleville. J’ai retrouvé la facilité de tourner qu’on ne rencontre qu’en province.
Puis Fabienne Camara et moi avons monté le film chez nous, en plein Belleville, en 8 semaines, sur Avid, tous les deux. Puis nous l’avons mixé, enfin il y a eu l’aventure du kinéscopage sur pellicule 35 mm à Eclair.
Il nous restait à trouver le titre du film
Nous l’avions tourné et monté chez nous. Pourquoi ne pas lui donner le nom de notre propre rue, RUE DU RETRAIT ?
René Féret
Bande annonce
Distribution
Mado : Dominique Marcas
Isabelle : Marion Held
Fred : Julien Féret
Sophie : Sacha Rolland
Catherine : Béatrice Lartigue
Zira : Alzira Suarez
médecin : Pascal Bérhault
Paul : René Féret
infirmière : Sara-Jeanne Drillaud
électricien : Frédéric Hulné
épicier : Poy Sim
voisine : Alice Sarfati
pharmacien : Jean-Louis Allmayer
le vigneron : Pierre Guillemot
Technique
Production : Films du XXème-JML Productions
Scénario : René Féret
Réalisateur : René Féret
Assistant réalisateur : Julien Féret
Directeur photo : François Lartigue
Assistant-caméra : Piotr Stadnicki
Scripte : Anne Portolan
Régisseuse : Géraldine Bastien
Ingénieur du son : Christine Charpail
Perchman : Franck Flies
Décors : Carlos Conti
Monteuse : Fabienne Camara
Mixage : Laurent Chassagne
Bruitage : Gadou Naudin
Musique : Benjamin Raffaelli
Photos
Presse
Le Figaro, Marie-Noëlle Tranchant : “Une histoire d’amour” (lire)
Le Monde, Jacques Mandelbaum : “Une vieillesse sans folklore, filmée contre l’indifférence” (lire)
La gazette Utopia : “Un grand petit film” (lire)